Tout savoir sur la nouvelle mouture du congé de paternité et d’accueil de l’enfant
Le changement avait été annoncé à l’automne dernier. C’est désormais chose faite suite à la modification de l’article D. 1225-8 du code du travail et le décret entré en vigueur le 10 mai 2021 qui apporte les précisions attendues.
L’une des principales nouveautés issues de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 est désormais l’interdiction de faire travailler le salarié pendant les 7 jours qui suivent la naissance.
L’objectif du gouvernement est que cette évolution permette aux pères de s’occuper pleinement de leur bébé dès leur naissance et de tisser avec lui des liens plus forts. Ainsi que de réduire les inégalités femmes-hommes en équilibrant un peu plus l’absence des parents de l’entreprise, qui est actuellement, hélas, toujours un frein dans la carrière des femmes. Enfin, cela devrait avoir pour effet de renforcer dès le départ une répartition équilibrée des responsabilités familiales.
Alors qu’est-ce qui change, et comment ça marche concrètement ? Faisons le point.
Allongement de la durée du congé de paternité et de la période de pose
Jusqu’à présent le congé de paternité était de 11 jours calendaires pour une naissance simple et 18 jours pour une naissance multiples. Il passe à 25 jours pour une naissance simple et à 32 jours pour une naissance multiple. Attention, il s’agit toujours de jours calendaires, ce qui signifie que tous les jours du calendrier sont décomptés, y compris les dimanches et les jours fériés.
Vous allez peut-être entendre parfois qu’il y a 28 jours de congé de paternité. C’est faux ! Il y a bien 3 jours de plus qui sont liés à l’arrivée d’un enfant au foyer, mais il s’agit là des 3 jours de naissance, qui sont des jours ouvrables (hors dimanche et jours fériés), rémunérés par l’employeur donc ce n’est pas le même régime juridique, même si concrètement, cela revient bien à 28 jours d’absence.
Quant à la période de pose du congé de paternité, elle passe de 4 à 6 mois. Dans une circulaire faisant référence à l’ancienne version du congé de paternité, l’administration avait précisé que celui-ci devait débuter effectivement avant l'expiration de ce délai (circ. DSS/2 A 2001-638 du 24 décembre 2001, II-1). Cela devrait continuer à s’appliquer, ce qui signifie que pour un enfant né par exemple le 1er octobre 2021, le 1er jour de la dernière période de prise du congé doit débuter au plus tard le 31 mars 2022, et peut donc s’achever un peu au-delà de 6 mois.
Quelles sont les règles à suivre pour prendre un congé de paternité ?
Période obligatoire
Grande nouveauté : Le congé de paternité ou d’accueil de l’enfant comporte une première période obligatoire de 4 jours calendaires consécutifs faisant immédiatement suite au congé de naissance. La seule exception autorisée est le cas où le salarié ne peut pas bénéficier des indemnités journalières de sécurité sociale de paternité faute d’en remplir les conditions d’ouverture du droit (c. trav. art. L. 1225-35-1).
A noter que le congé de naissance, qui devait auparavant être pris dans un délai raisonnable suite à l’arrivée de bébé, devient lui-même obligatoire à partir du jour de naissance ou à partir du premier jour ouvrable qui suit, au choix du salarié (ou à l’issue de ses congés payés si le salarié est en congés à cette période).
Qui dit obligation, dit sanction en cas de non-respect. Que peut-il se passer alors si le salarié ou l’employeur n’applique pas ces dispositions ? Côté salarié, pas de sanction pénale. Cependant, s’il ne prend pas ces 4 jours obligatoires, il sera privé du versement des IJSS de paternité (c. séc. soc. art. L. 331-8). Côté employeur, il s’exposera à des sanctions civiles. En effet, les solutions jurisprudentielles concernant l’interdiction d’emploi de la femme venant d’accoucher pourraient être transposées à la situation du bénéficiaire de cette nouvelle interdiction.
Période fractionnable
Une fois prise la période obligatoire de 7 jours (3 jours de naissance + 4 jours de congé de paternité accolés), le salarié a plusieurs options :
- Soit en rester là et ne pas prendre le reste de son congé de paternité
- Soit prendre la totalité de son congé de paternité d’un seul coup, c’est-à-dire immédiatement ses 21 jours restants
- Soit fractionner son congé restant en une ou deux fois, dont chaque période doit avoir une durée minimale de 5 jours.
En dehors de ces situations, l’employeur sera en droit de refuser le congé. Et la sécurité sociale pourrait également refuser le versement des IJSS.
Délai de prévenance d’un mois
Bien évidemment, l’employeur va devoir s’organiser pendant l’absence du salarié. Ce dernier doit donc l’informer en respectant un délai de prévenance d’un mois, d’une part avant la date prévisionnelle de l’accouchement, et d’autre part avant chaque période de congé de paternité souhaitée si celui-ci est fractionné.
Aucun formalisme particulier n’est imposé, mais un écrit est toujours recommandé afin de se ménager une preuve, d’un côté comme de l’autre. Le salarié devra informer l’employeur de la durée du congé paternité dont il souhaite bénéficier, mais également des dates précises pour chaque période souhaitée.
Conséquences d’une naissance précoce ou tardive
Si la naissance survient plus tôt, comme c’est souvent le cas, l’article D. 1225-8 du code du travail précise alors que, « sans préjudice des dispositions de l’alinéa précédent, en cas de naissance de l’enfant avant la date prévisionnelle d’accouchement, lorsque le salarié souhaite débuter la ou les périodes de congé au cours du mois suivant la naissance, il en informe sans délai son employeur ». Il ne sera donc vraisemblablement pas possible pour l’employeur de s’en tenir aux dates initialement prévues, charge à lui de se réorganiser.
Si la naissance survient plus tard, rien n’est précisé dans le code du travail. On peut supposer que le salarié devra informer l’employeur de ses nouvelles dates de congé qui seront alors applicables sans délai. Logiquement, il ne devrait pas pouvoir prendre son congé de naissance, ni son congé de paternité aux dates initialement prévues puisqu’il ne pourrait pas être indemnisé, ne pouvant apporter les justificatifs de naissance.
Qu’est-ce que le congé supplémentaire en raison de l’hospitalisation de l’enfant ?
Il s’agit d’un droit octroyé aux bénéficiaires du congé de paternité en cas d'hospitalisation immédiate de l'enfant après la naissance pendant toute la période d'hospitalisation dans une ou plusieurs unités de soins spécialisés, pendant une durée maximale de 30 jours consécutifs (c. trav. art. L. 1225-35 et D. 1225-8-1 ; c. séc. soc. art. D. 331-6). Ce congé existait déjà mais a été lui aussi modifié par le décret du 10 mai 2021.
Si le salarié souhaite en bénéficier, il sera désormais obligatoirement accolé au congé impératif de 4 jours et ne pourra être pris ultérieurement. Le congé supplémentaire est de droit. Le salarié n'a donc aucune autorisation à demander à l'employeur, il lui suffit de l'informer, le plus tôt possible, par tout moyen et sans aucun délai de prévenance. Il pourra en justifier par la suite en produisant un bulletin d'hospitalisation.
Qui sont les bénéficiaires du congé de paternité ?
Les bénéficiaires du congé de paternité et d’accueil de l’enfant sont les mêmes que pour le congé de naissance. Ce peut être :
- Le père biologique
- Le.la conjoint.e
- Le.la concubin.e ou partenaire pacsé de la mère
Le père biologique en bénéficie, même si la naissance n’intervient pas à son foyer et qu’il est séparé de la mère. Le conjoint, concubin ou partenaire pacsé en bénéficie, même s’il ne s’agit pas du père biologique, qui bénéficiera lui-même de son propre congé de naissance.
En résumé, 2 personnes peuvent bénéficier du congé de paternité pour le même enfant, et pourquoi pas au sein d’une même entreprise ! Tout est possible, même si là les relations entre collègues risquent d’être tendues… En revanche, le conjoint, concubin ou partenaire pacsé du père biologique n’a droit à rien.
Comme pour tout congé spécifique, celui-ci est attribué sur justificatif. Si le bénéficiaire est le père de l'enfant, il devra fournir un document attestant de la naissance de son enfant, c'est-à-dire au choix la copie intégrale de l'acte de naissance de l'enfant, la copie du livret de famille à jour, la copie de l'acte de reconnaissance de l'enfant par le père. Si le bénéficiaire n'est pas le père de l'enfant, il devra fournir non seulement une pièce justifiant de la naissance de l'enfant, mais également une pièce attestant de son lien avec la mère de l'enfant (soit un extrait d'acte de mariage, soit la copie du Pacs, soit un certificat de vie commune ou de concubinage de moins d'un an ou, à défaut, une attestation sur l'honneur de vie maritale cosignée par la mère de l'enfant).
L'équipe Ludik' souhaite à tous les conjoint(e)s. de bien profiter de ce congé auprès de leur nouveau-né !